Chères et chers Membres et Amis,
Nous vous souhaitons une belle suite d’été et espérons trouver un peu de votre temps pour prendre connaissance de nos activités ne souffrant d’aucun ralentissement durant la période.
1° Syrie
Comme précédemment annoncé notre responsable s’est rendu sur place du 13 au 19 juillet. Les nombreux déplacements et échanges avec les membres de l’équipe ‘Vivere-Syrie’ visaient bien sûr tant à évaluer le travail en cours que de mettre au point la suite des opérations. C’est avec plaisir que nous vous présentons ici les bénévoles de cette équipe :
Extraits du carnet de notes de voyage :
Généralités pays
« Pour la majorité de la population le régime actuel, tant président que gouvernement et édiles locales sont totalement discrédités, mais extrêmement craints pour leur capacité d’oppression et de nuisance. Il y avait des élections parlementaires le 16 juillet : sur une quarantaine de personnes avec lesquelles j’ai pu échanger à ce sujet, une seule s’était déplacée aux urnes.
À tous les âges à partir de l’adolescence, les Syriens veulent quitter leur pays en visant d’abord l’Europe. Expression largement répandue ici : « chaque Syrien a sa valise prête au départ. »
Énormément de familles ne survivent que grâce aux fonds envoyés par un ou des proches expatriés.
L’économie générale du pays est au plus bas, l’inflation atteint des proportions hallucinantes. Parmi les denrées de base et les produits de première nécessité, aucun prix n’est stabilisé, l’enchérissement de la vie de tous les jours ne fait que croître d’une semaine à l’autre.
Ici ou là on voit quelques foyers vivant confortablement. Mais nul doute qu’une très large partie de la population est cantonnée en dessous du seuil de pauvreté. L’accès aux soins est notamment quasi exclu pour le plus grand nombre, les établissements de santé publique sont dépourvus de l’essentiel. Il y a nombre d’hôpitaux privés mais au coût hors de portée pour la plupart des citoyens.
Rémunérations : les fonctionnaires comme les soldats de l’armée nationale perçoivent l’équivalant de US$ 25 / mois. Soit 1 plein d’essence, ou encore 1 mois de loyer pour un minuscule deux pièces dans un immeuble vétuste. Un interlocuteur avisé me dit que le revenu du minimum vital pour une famille de 4 personnes devrait être de US$ 200 par mois.
Un peu partout sur mon parcours j’ai vu des personnes âgées tout comme de très jeunes enfants ramasser & collecter des déchets plastique dont la revente ne leur rapportera même pas assez pour deux repas frugaux par jour.
Les conditions de détention sont épouvantables ; consulter cette enquête minutieuse d’Amnesty International :
Généralités de notre région de travail
(pas cité en clair pour raison de sécurité)
La ville et ses environs sont totalement sous le contrôle de Damas. Il semble que tous les éléments de l’État Islamique (Daech), qui ont longtemps sévi ici, ont été chassés. Mais par la suite les forces gouvernementales ont atrocement réprimé d’innombrables personnes soupçonnées, à tort ou à raison, d’avoir eu une attitude contestatrice anti-régime. Des villages entiers ont été réduits en cendres par l’aviation du président.
La ville a été détruite aux ¾ durant les années de guerre. Aujourd’hui certains quartiers parmi les moins touchés sont en cours de réfection et de déblaiement des amoncellements de gravats. D’autres quartiers entiers sont restés figés dans un état de ruine et d’inhabitabilité totale.
Eau courante et électricité disponibles par intermittence.
Mouvements de population : mis à part les dizaines de milliers de réfugiés à l’étranger, des milliers d’autres habitants d’ici ont fui la région pour s’établir ailleurs dans le pays. Quasiment en même temps, des milliers de Syriens fuyant les combats au Nord et à l’Est sont venus ici, soit en occupant les logements abandonnés par leurs propriétaires soit en se massant sous des tentes, dans des garages, etc. ; pour la plupart ces gens-là sont toujours présents aujourd’hui tandis que des déplacés partis d’ici reviennent progressivement, d’où une énorme problématique de l’habitat.
Corruption : généralisée. Tout individu investi d’une mini-once de pouvoir en abusera pour faire payer le moindre service ou laisser-passer. Pour justifier cela on invoque la nécessité de survivre.
Action de « Vivere-Syrie » (titre que l’équipe s’est auto-attribué au début de la collaboration en 2015)
Fondée et inspirée par M.N., ce groupe représente une vingtaine de bénévoles avec une forte proportion de jeunes de moins de 30 ans. Trois à quatre parmi eux assurent des responsabilités régulières quasi quotidiennes (identification de nouveaux cas à secourir, visites à domicile, tenue de registres et de comptabilité, gestion de stocks, etc.)
Complément nutritionnel pour bébés jusqu’à 12 mois d’âge :
- L’action se poursuit avec un nominal mensuel de 35 nourrissons, recevant LS (livres syriennes) 150’000/mois de soutien alimentaire, soit environ US$ 11/mois. C’est d’évidence un montant modeste, même en standards syriens, mais sans exception toutes les familles que j’ai rencontrées estiment que cette somme est vitale pour un minimum de sécurité nutritionnelle de leur enfant. Leurs affirmations ne sont pas feintes. Un grand nombre de pères de famille réduits à travailler comme portefaix gagnent moins de LS 300’000 par mois !
- L’équipe gère une liste d’attente de plusieurs centaines de cas. J’ai assisté à une séance d’enregistrement de nouveaux cas durant laquelle M.F. expliquait aux parents que leur tour viendrait seulement en décembre prochain.
- Aucune discrimination : les bénéficiaires sont des enfants tant musulmans que chrétiens.
- L’enquête sociale préalable est assez sommaire. L’équipe est persuadée que les parents sollicitant une aide aussi minime ne peuvent provenir que des milieux les plus pauvres, et elle a probablement raison. Les visites à domicile que j’ai effectuées confirment ce raisonnement.
En résumé : la durée de l’aide est courte, le montant attribué est faible, cependant le bien-fondé et l’utilité de ce travail me semblent indiscutable ; il nous faut donc poursuivre. Garder en mémoire que tant la durée que le montant ont été définis par l’équipe elle-même, alors que Vivere était et reste ouvert à d’autres équations dès lors qu’elles se conforment au budget à disposition, CHF 650 à 700/mois (€ 680 à 733). »
Avec la rotation des âges au sein du groupe de bénéficiaires, 11 nouveaux bébés ont été pris en charge en juin, et 14 nouveaux en juillet. La photo montre une famille venue en juillet pour l’inscription du nouveau-né.
2° Burundi
Avec notre partenaire local l’ass. SFBSP, nous poursuivons la réhabilitation socioprofessionnelle de femmes contraintes à la prostitution dans les conditions les plus dangereuses. Lors d’échanges sur place l’an dernier avec le groupe de femmes bénéficiaires nous avons réalisé que parmi celles qui en ont, leurs enfants n’étaient pas dotés d’un état civil. Manque de ressources pour effectuer la démarche administrative, discrimination envers les travailleuses du sexe, paternité inconnue, pas de domicile fixe, ces raisons s’entremêlent et résultent dans le fait que l’enfant n’a pas d’existence légale, ne pourra pas être soigné dans les centres de santé publique ni être scolarisé. Dès après avoir compris les facettes du problème nous avons suggéré au partenaire de mettre une avocate à disposition de chaque couple mère-enfant concerné pour que l’obtention de l’état civil soit assurée en bonne et due forme. Ce qui a nécessité des mois de travail.
Le mois dernier SFBSP nous a adressé le rapport conclusif. Vingt enfants sont désormais pourvus d’un état civil. Les témoignages des mamans cités dans ce rapport nous touchent beaucoup par leur simple et belle véracité. S’il le fallait encore les mots de ces dames attestent du bien-fondé humain de ce mini-projet. Et corroborent l’expérience de Vivere qu’avec des ressources limitées on peut changer positivement le cours des vies de personnes dont les droits fondamentaux sont en danger. En l’occurrence le droit aux soins et à l’éducation d’enfants qui étaient brutalement désocialisés.
Les voici, lors d’une petite cérémonie marquant le terme des démarches de légalisation :
« Avant que je commence le travail de sexe, je vivais ensemble avec un mari illégal. Quand ma grossesse avait 7 mois, l’homme en question m’a quitté à cette période et c’était la dernière vue. Ma fille n’a jamais connu son père. A l’âge de 3 ans, je suis allée à l’école maternelle pour qu’elle soit inscrite et commence la maternelle mais en vain car je ne dispose pas son extrait d’acte de naissance. Comme maintenant la SFBSP-Burundi m’a appuyé pour avoir cet extrait, ma fille va fréquenter l’école cette année ci au mois de Septembre. Que Dieu bénisse cette organisation SFBSP qui ne cesse pas de nous appuyer de différentes manières».
« Je suis une femme travailleuse de sexe et un jour, je suis tombée enceinte sans connaitre qui il m’avait engrossé parce que je rencontre avec beaucoup d’hommes. Et voilà j’ai accouché des jumeaux tous garçon qui n’ont pas de père. Mes enfants tombaient souvent malades et je me dirigeais à l’Hôpital du District Nord pour les faire soigner. Mais comme ils ne sont pas reconnus légalement, les prestataires de soins refusaient de m’accueillir alors que là-bas les enfants de moins de 5 ans reçoivent les soins gratuitement or que moi j’étais dans l’incapacité de payer les soins en totalité. Pour cette cause, je retournais à la maison et si je recevais la chance d’avoir un client, j’allais acheter les médicaments à la pharmacie. Maintenant après avoir reçu leurs extraits d’acte de naissance chaque fois qu’elle tombait malade je vais directement au structure sanitaire même si j’ai zéro franc et ils reçoivent un traitement, je ne sais quoi dire pour remercier la SFBSP-Burundi de nous aider pour que nos enfants aient une identité légale. »
3° Trafic d’êtres humains : assistance aux victimes
L’Équipe partenaire de Vivere dans un pays du Golfe Persique (non désigné ici pour motif de sécurité) secourt entre 10 et 15 victimes par mois tout au long de l’année. Identification, extraction du milieu d’exploitation, soins et protection, démarches légales pour reconstituer son état civil, achat du billet d’avion pour son rapatriement le plus rapide possible.
Parmi les comptes-rendus récents : « Aida (prénom d’emprunt) était en contact avec des Ouzbeks par réseaux sociaux pour discuter de possibilités d’emploi. Une femme, Olivia, lui a dit que sa sœur travaillait dans le secteur de l’hôtellerie à XX (localité dans le Golfe) et y gagnait des milliers de dollars par mois. Aida n’était pas satisfaite de son emploi dans une usine textile et voulait changer de vie. Finalement, elle s’est envolée pour XX et y a rencontré une femme nommée Nodira – mais ce n’est pas son vrai nom. Cette Nodira l’a emmenée dans une villa miteuse, où elle lui a expliqué que le commerce le plus rentable était le sexe, c’est-à-dire la prostitution. Aida a d’abord refusé, mais deux hommes sont entrés dans la pièce et l’ont battue. Lorsqu’ils ont férocement commencé à lui enlever ses vêtements, elle a finalement dû accepter. Elle a été placée dans une petite chambre de cette villa, où elle devait satisfaire quotidiennement jusqu’à 12 hommes de différentes nationalités. Aida recevait l’équivalant de CHF 47 par jour (€ 49). Au bout d’un mois, Nodira l’a transférée dans un petit hôtel, où elle percevait désormais l’équivalant de CHF 70 par jour (€73) – mais le nombre de clients était passé à 15… 16 par jour. Le jour de son arrestation, elle devait se rendre dans un autre hôtel avec l’un des hommes de Nodira. Elle y avait vu deux jeunes Arabes en gandoura. Elle a réussi à se détacher du garde de Nodira, qui lui a pris la fuite. Ces Arabes étaient en fait des agents de police. Aida a été détenue au siège de la police, mais n’a pas pu contribuer à l’arrestation des exploiteurs. La police l’a relâchée sans pénalité mais avec ordre de déportation, en nous prévenant qu’elle avait besoin d’assistance. Nous l’avons prise en charge et réussi son rapatriement en Ouzbékistan en moins de 3 semaines ».
5° Défense d’accusés de blasphème risquant la peine de mort
Parmi les rares courageux avocats amis collaborant en Asie avec Vivere pour tenter de sauver les vies d’accusés de blasphème, Saïd (prénom d’emprunt) a eu dix dossiers en mains jusqu’à présent, en ayant obtenu l’acquittement de trois femmes. C’est avec grande tristesse que nous vous informons que Yamna (prénom d’emprunt) est décédée en prison courant semaine dernière ; son état de santé était gravement défaillant et elle n’a pas eu les soins médicaux nécessaires. Accusée d’avoir déchiré des pages du Coran, assurément une fausse dénonciation, et aussitôt arrêtée en mai 2021, elle croupissait depuis lors en détention. L’évidente détérioration de son état physique ne lui a pourtant valu aucune clémence. Lors de l’ensevelissement de sa dépouille aucune parenté n’était présente. Il est fréquent que les proches d’un-e accusé-e de blasphème soient obligés de s’éloigner voire de renier le détenu afin de ne pas encourir des soupçons de complicité et un châtiment similaire.
5° Peut-être pouvez vous aider :
- En juillet nous avions 276 abonnés à ces Brèves. N’hésitez pas à nous passer les coordonnées de personnes pouvant être intéressées de les recevoir. Merci !
- Pour nos partenaires en Afrique et en Ukraine il y a besoin de téléphones et d’ordinateurs portables récents et en bon état, introuvables sur place ou alors à coût élevé. Si vous avez de disponible un ou des appareils de seconde main, merci de bien vouloir les faire parvenir à l’adresse ci-dessous. Dans les contextes où nous travaillons la capacité de communication est souvent vitale, au sens fort du terme.
Nous vous sommes reconnaissants de votre attention sur ces activités et restons à votre entière disposition pour toute question y relative. Avec notre meilleure considération et nos vœux pour une belle suite d’été qui puisse combler vos aspirations !
Le comité de Vivere